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Mali : une merveille de 500 ans se refait une jeunesse, malgré les périls

Le tombeau des Askia avait enfin commencé sa restauration quand un toit a lâché, mi-août, sous l’effet des ans et des pluies, éclairant la vulnérabilité du monument en terre crue de Gao, au nord du pays, et la menace du changement climatique. Inscrit au patrimoine de l’humanité en 2004, le tombeau a été édifié en 1495 par l’empereur Askia Mohamed, sous le règne duquel Gao est devenue la capitale de l’empire Songhaï et l’islam la religion officielle.
Le site était en chantier depuis le mois de mars. Mi-août, le Sahel a essuyé des précipitations torrentielles. « Depuis dix ans, on n’avait pas eu cette quantité de pluie », dit Abdoulaye Cissé, architecte qui apporte à la réhabilitation son expertise de l’architecture en terre crue pour le compte d’une ONG française.
Une partie du plafond de la mosquée des hommes, qui flanque avec celle des femmes le tombeau proprement dit, une pyramide à degrés de dix-sept mètres de haut, a cédé sous le poids de la terre gorgée d’eau lors de la réfection d’un pilier. M. Cissé relativise : le chantier aurait été arrêté de toute façon pendant la saison des pluies et aurait repris après, fin septembre, peut-être. Et puis ce contretemps, après beaucoup d’autres, était prévisible. Les travaux menés depuis mars l’ont confirmé : « La structure est affaiblie, les bois sont très, très vieux. »
Le tombeau, avec les mosquées à toit plat, les nécropoles et l’espace des assemblées en plein air, a été versé en 2012 au patrimoine mondial en péril quand les djihadistes et les indépendantistes ont pris Gao et Tombouctou, ville également reconnue par l’Unesco pour son intérêt exceptionnel. L’organisation onusienne a conclu que la protection du site de Gao ne pouvait plus être garantie. Depuis, les rebelles ont été chassés des villes, mais la région est toujours en proie aux violences, et les experts étrangers ne viennent plus.
Aussi, le chantier est une heureuse nouvelle. Ali Daou, chargé de programme à l’Unesco, n’a « pas connaissance d’une intervention d’une telle envergure sur le tombeau » en un demi-millénaire d’existence. Certes, tous les deux ans environ, les habitants se rassemblent pour le traditionnel « crépissage », la reprise de l’enduit en banco, mélange de terre argileuse et de paille hachée. Ils s’appuient sur l’échafaudage permanent de perches qui font saillie de la pyramide et lui donnent son allure unique.
Mais ce soin constant peut altérer la conservation. Les surcharges de terre créent des fragilités, l’emploi de bois exotique à la place du hasu local qui se fait rare compromet l’authenticité de l’ensemble. Une partie du chantier consiste donc à remplacer le bois incongru ou dévoré par les termites, dit M. Cissé. Une autre vise à redonner sa forme originale à une construction « très érodée par la pluie et le vent ».
Le Sahel, à la marge du Sahara, est l’une des régions au monde les plus sévèrement exposées aux conséquences du réchauffement. Avec le nord des pays du golfe de Guinée, il a essuyé ces dernières semaines des pluies « globalement supérieures de 120 % à 600 % à la moyenne de la période de référence 1991-2020 », rapporte l’organisme pour la sécurité alimentaire Agrhymet. Les inondations ont fait des centaines de morts.
Le Monde avec AFP
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